le Burn-out est-il une maladie professionnelle?

Le Burn-out ou Syndrome d’Epuisement Professionnel se caractérise par une détresse émotionnelle, physique et psychique. C’est un processus délétère effondrant la motivation de sujets très impliqués et engagés dans leur travail, face à des situations d’une relation d’aide concernant un public en grande souffrance psychique. On peut y pointer le rôle des conflits de valeur, du sens du travail, de la qualité empêchée, des exigences d’un travail sans marge de manœuvre, de la fragilisation des collectifs de travail. Ce syndrome se caractérise comme une spirale de l’érosion de l’engagement, des sentiments, et la diminution de l’accomplissement personnel. Il peut conduire à une dépression professionnelle, à une anxiété généralisée ou un Etat de Stress Post-traumatique.

Ce syndrome n’est pas reconnu par la classification médicale internationale comme une pathologie.

Les descriptions les plus diverses du Burn-out le caractériseraient par des dizaines de signes cliniques si divers qu’ils peuvent être contradictoires entre eux ! Aujourd’hui le Burn-Out apparait comme concept pléthorique des pathologies d’épuisement.

Il y a un risque à employer des « mots valises » amalgamant cause et conséquence, moyen de dédramatiser la maladie sans la nommer, ni d’analyser le travail !

L’emploi du vocabulaire de Burn-out présente un avantage pour quatre publics aux motivations et intérêts bien différents :

– Pour l’employeur, il évite de nommer la causalité du travail et de son organisation, en le dégageant ainsi des responsabilités de son « obligation de résultat » pour en prévenir les risques, pourtant maintenant bien décrits dans le rapport du Collège d’expertise des RPS.

– Pour les médecins il exempte, croient certains, de leur responsabilité à faire un diagnostic médical, à en instruire le lien avec le travail, et à le tracer en tant que de besoin par un Ecrit médical.

– Pour les politiques il permet de surfer sur la souffrance sociale, en oubliant les obligations régaliennes de prévention des effets d’un travail délétère et du devoir d’en permettre une réparation en maladie professionnelle, sous une forme accessible à tous et non limitée à des Incapacités supérieures à 25 %. Il n’y a toujours aucun décret permettant d’encadrer la prévention des organisations du travail pathogènes, la loi le permettant datant de 1991 !

– Pour les salariés, l’emploi de ce vocabulaire est une façon de dire et de socialiser leur souffrance psychique professionnelle, malheureusement pour eux d’une façon qui ne leur permet pas d’en comprendre les causes ni que soit nommée la pathologie qui les invalide et ne pourra donc pas être reconnue.

De fait, se déploient suite à cela de multiples tentatives d’individualisation des causes renvoyant à de soi-disant faille de la structure de la personnalité et enfermant dans des pratiques de soins comportementaux où la compréhension des causes communes au collectif de travail n’est pas nommée. Cela structure le risque de psychologisation et de victimisation. Les coaches, les cellules d’écoute, les numéros verts, et tous soins sous subordination et injonction de l’employeur fleurissent. Les employeurs ont maintenant des prétentions de soignant pour s’exempter de leur responsabilité de prévention des risques à la source des organisations du travail !

On rend invisible ce qui fait difficulté dans le travail pour pouvoir travailler ensemble. On ne prend pas en compte le souci de chacun de pouvoir bien travailler, gage d’une construction de la santé au travail.

Oui à un tableau de maladie professionnelles s’appuyant sur les risques repérés scientifiquement par le collège d’expertise des RPS et permettant la réparation des trois pathologies nommées précédemment, identifiées par la commission spécialisée du COCT : Dépression professionnelle, anxiété généralisée, stress post traumatique.

Oui à une démarche préventive permettant de sauvegarder les bases de la coopération professionnelle, fondées sur la capacité à discuter entre pairs des difficultés du travail permettant des disputes et la construction de règles de métier et ainsi la transformation collective des organisations pathogènes.

Il faut d’urgence rouvrir un débat sur les moyens de penser, préserver et de développer les coopérations et le « travailler ensemble ».

Dominique Huez, membre du CA d’ASD-Pro

Juillet 2015

Pour en savoir plus :

http://www.travailler-mieux.gouv.fr/IMG/pdf/Rapportfinal_Pathopsy_Travailler-Mieux.pdf

http://www.travailler-mieux.gouv.fr/Recommandations-pour-l-examen-des.html